Katyn, le massacre.
Publié le 21 Avril 2009
Vision d'horreur pour commencer.
Deux foules se tiennent face à face sur un pont, l'une tentant d'échapper aux nazis, l'autre aux communistes. Foules qui ne comprennent pas pourquoi ceux d'en face tentent de fuir l'havre de paix qu'elles souhaitent rejoindre.
Le ton est donné ; la suite arrive vite, les représentants de ces deux totalitarismes se serrent la main, concrétisant le pacte germano-soviétique, s'entendant dans la répartition des prisonniers, comme n'importe quelles armées alliées.
C'est la vie sous les jougs stalinien et nazi qui nous est ici présentée par Andrzej Wajda, dont le père est mort dans le massacre qui fait l'objet du film. La majeure partie du film dépeint la répression par ces deux totalitarismes, les femmes de polonais tentant, autant que faire se peut, de survivre entre la peste et le choléra. On lira avec profit, ce billet de SPQR, qui retrace l'ensemble des événements.
La guerre n'avait pas été déclarée par les soviétiques aux polonais. Katyn, où plus de 22 000 prisonniers polonais ont trouvé la mort au printemps 1940, est donc un crime de guerre. Ce crime a permis d'éradiquer une grande partie de l'élite d'un pays que le petit père des peuples savait rétif au nouvel ordre communiste. Il a fallu attendre 1990 pour que l'URSS reconnaisse sa responsabilité dans ces crimes commis par le NKVD. Le tribunal de Nuremberg avait imputé la responsabilité de ce crime aux nazis, et pendant les décennies suivantes, c'était le discours développé par l'URSS, on le sait, l'histoire est écrite par les vainqueurs.
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Pierre Assouline évoque les difficultés du film à sortir, et les met sur le compte d'une mauvaise gestion de la part des polonais. J'avoue avoir un gros doute sur la question, tant le sujet du film vient contredire l'idée d'une Armée Rouge libératrice, qui était pourtant le refrain seriné par tout ce que l'Europe comptait d'intellectuels dans les années 50. Ce film est la mauvaise conscience de tout ceux qui ont porté aux nues le régime soviétique, tous les porteurs de valises. Normal qu'on ne lui ait pas facilité la tâche.
Le film a été accusé implicitement d'antisémitisme par le Monde, pour le simple prétexte qu'il n'évoquerait pas les juifs durant la période ou que les rafles de polonais reprenaient la même thématique que les juifs. Le journaliste qui a osé écrire de telles inepties mérite qu'on l'agonisse d'injures, on n'a pas idée de raconter des salades pareilles. A cette aune, la Grande Vadrouille et la Grande Evasion sont antisémites, je ne m'y souviens pas de la mention d'un seul juif. D'ailleurs, il faudra m'expliquer comment on fait la distinction, concrètement, entre une rafle de non-juifs, et une rafle de juifs.
Face à ces accusations, il a fallu qu'un fondateur de Solidarnosc monte aux créneaux pour défendre le film. En sus, il faut noter cet article de Libération, par Jean-Charles Szurek, qui souligne à juste titre l'empire du mensonge qu'a été l'Union Soviétique. La réaction des polonais a été vive, mais n'a pas permis au film d'avoir une audience un peu plus large. Le film n'est présenté que dans 13 salles en France. Vous avez bien lu, 13. A ce niveau, c'est du militantisme que d'aller voir ce film.
C'est la scène finale qui prend aux tripes. Celle de l'exécution. Méthodique. Un par un. Un homme, une balle. Aucun espoir d'y réchapper.
Un Notre Père s'échappe de la bouche d'un condamné. Le chapelet qu'il tient à la main est la dernière image qu'on retient du film.
En signe de pardon ?