Emois dans la cathosphère
Publié le 10 Septembre 2010
Une fois de plus, ça gamberge et ça tangue dans la cathosphère. Un dénommé François H., dans un long papier publié sur le site Benoit et moi, procède à une attaque en règle, et me semble-t-il, méritée, contre le journal la Croix. Isabelle de Gaulmyn y répond ici, en se contentant seulement de relever la forme du texte, sans évoquer le fond un seul instant. Enfin, François H écrit de nouveau un texte en réponse à ce billet, ici-même. Textes que je vous invite tous à lire.
Deux choses m'ont frappé, comme à l'accoutumée dans ce genre de débat. Le tradi parle tradi, c'est à dire qu'il intellectualise, argumente, explique, donne des exemples, met en lumière sa vision des choses. La journaliste, plutôt progressiste, parle de forme et de sentiment, ce que reflète le titre de sa réponse : "Et si on se parlait ?". Le problème étant qu'on peut se parler autant qu'on le souhaite, lorsque les doctrines sont irréconciliables, le dialogue est d'une grande inutilité. Le sujet est donc la couverture du journal la Croix des différents épisodes des polémiques autour du pape, et de la publication de tribunes pour le moins partiales, voire même contestatrice du magistère, dans ses colonnes.
N'en déplaise à mes amis blogueurs, que je salue au passage, votre réaction est, me semble-t-il, caractéristique en évoquant toujours la lutte intérieure. Oui, vous avez raison, c'est vrai, je suis le premier pécheur, le vrai combat se situe en moi. OK, c'est entendu, je suis le premier à manquer de charité, il faut prier pour ses contradicteurs; ce que reconnait également François H. Mais au-delà de ça, on fait quoi ?
Est-ce parce que je suis le premier qui lutte pour être catholique que cela m'interdit de porter un commentaire sur certaines tribunes, surtout lorsqu'elles viennent du porte-parole officieux de la conférence des évêques de France ? Dois-je faire l'autruche et ne pas constater lorsqu'elles vont à l'encontre du magistère de l'Eglise ? La charité m'interdit-elle d'exprimer la vérité ? Je ne le crois pas, et certains commentateurs sur le blog d'Isabelle de Gaulmyn l'ont bien relevé par des exemples précis. D'autant que je ne vois pas en quoi amour et réprimande seraient incompatibles, c'est même l'une des composantes essentielles de la pédagogie. Ce n'est pas parce que l'on n'est pas d'accord avec telle ou telle frange des catholiques, que l'on serait pour autant incapables d'être charitables, de les écouter respectueusement, etc. Le point Godwin des progressistes concerne clairement la charité : dès que l'on porte une critique, on manquerait de charité. Mais il n'y a rien de plus faux, bien au contraire, la charité implique justement de dire la vérité. Il faut bien évidemment la manier avec les formes nécessaires, faire attention à la manière dont elle est reçue, et viser à faire grandir la personne qui nous fait face, mais on ne peut faire l'économie de la vérité, ce serait aller à l'encontre du message catholique.
Si je suis d'accord pour affirmer que certains mots sont de trop dans les écrits de François H, je n'ai malheureusement lu aujourd'hui AUCUNE contestation factuelle de tous les éléments rapportés, et qui plaident clairement en son sens. Le journal la Croix produit de temps en temps des articles d'exception, notamment spirituels. Ainsi, celui sur la nuit de la foi, en est un admirable. Mais pour un article de ce type, combien d'erreurs, d'approximations sur d'autres ? Vous qui n'êtes pas tradi, n'avez pas lu les erreurs, les jugements, les caricatures qu'un Sénèze a pu déblatérer à longueur de colonne, sur ceux qui ont le malheur d'opter pour le rite tridentin. J'attends toujours avec impatience la tribune d'un abbé de Tanoüarn ou Laguérie dans les pages du quotidien catholique de référence. Or si ce journal était vraiment ce qu'il dit être, à savoir représentatif de la diversité catholique, alors on aurait eu des papiers, des tribunes concernant les tradis. Mais pour le moment, rien. Autre point, deux ans après avoir commencé à le regarder sur certaines émissions, j'ai compris que Michel Kubler, ancien directeur de la rédaction, était prêtre. Une seule question : trouvez-vous cela normal, de la part d'un ministre du Christ ?
Pourquoi croyez-vous que la sphère tradie a crée des écoles, des maisons d'édition, des revues, des journaux ? Parce que l'accès aux médias de l'Eglise de France leur était définitivement bloqués. C'est une réalité, que cela vous plaise ou pas, et qui n'a rien à voir avec la catholicité des uns ou des autres. Enfin, il faut rajouter également que le rôle officiel du journal la Croix en fait un média dont il faut tenir compte. Ce n'est jamais anodin qu'un papier dans la Croix conteste le magistère, c'est même, dans l'ordre théologique, un scandale parce que cela a une implication publique, parce que des dépositaires de la foi catholique contestent publiquement le magistère. En ce sens, les catholiques attachés à la vérité ne peuvent pas se taire, sous prétexte qu'ils manqueraient à la charité s'ils s'exprimaient.