ALLELUIAH ! ALLELUIAH ! ALLELUIAH !

Publié le 24 Janvier 2009


Il faut avoir vécu chez les parias, s'être fait traiter de tous les noms, de schismatiques, d'excommuniés.
Il faut avoir assisté aux messes dans des garages, des granges, des parvis d'église, sur des nationales dans le froid, gardés par les CRS.
Il faut avoir assisté à des expulsions d'église par les forces de l'ordre mandatées par les évêques.
Il faut avoir vu la colère et le mépris de vos interlocuteurs, clercs ou catholiques, lorsqu'on osait prononcer le nom de Mgr Lefebvre.
Il faut avoir grandi et été éduqué à la Fraternité Sacerdotale St Pie X pour comprendre la joie que l'on peut ressentir à l'annonce d'une telle nouvelle.

Vous me pardonnerez donc de me lâcher un peu.

Aujourd'hui, c'est la fête.

Le pape a donc décidé de retirer l'excommunication que la Fraternité Sacerdotale St Pie X contestait depuis le sacre de Mgrs Fellay, de Galarreta, Tisser de Mallerais, et Williamson en 1988 par Mgr Lefebvre, et Mgr de Castro-Mayer.

La dispute a toujours été violente  pour savoir si les évêques étaient officiellement schismatiques ou pas. La raison essentielle de l'excommunication pesant sur Mgr Lefebvre était d'avoir ordonné des évêques sans l'accord du pape, accord obligatoire depuis Pie XII, qui avait promulgué cette mesure, pour éviter les évêques communistes. En effet, Mgr Lefebvre, dans la tourmente de la suite du concile Vatican II, s'était élevé contre le nouveau rit imposé partout en France, fondant son propre institut, la Fraternité sacerdotale St Pie X, à Ecône en Suisse.
Mgr Lefebvre (1905 - 1991)
En 1988, Mgr Lefebvre, se sentant faiblir, avait choisi de passer outre les recommandations de Jean-Paul II et de Mgr Ratzinger, ne sachant pas si ils accorderaient la totale liberté à la messe en latin. L'idée de l'ancien évêque de Dakar était de maintenir un espace à "l'abri" des évêques français. C'est ce que la fraternité St Pie X appelait l'état de nécessité (état de nécessité que Benoit XVI semble avoir reconnu pour la France) qui justifiait ainsi de telles mesures pour "préserver" le rite tridentin. On sait que pour une congrégation, l'élément déterminant est l'évêque, qui est le seul à pouvoir ordonner des prêtres, prêtres qui sont le gage de la continuité de la congrégation. Pas d'évêque, pas de prêtres, les enjeux sont limpides.

D'ailleurs, la fraternité St Pierre, née de la division de la fraternité St Pie X à propos des sacres, a eu fort à faire sur les 20 dernières années pour obtenir quelques rares lieux de culte, justifiant ainsi l'attitude de retrait de la fraternité de Mgr Lefebvre.

Les relations entre le Vatican et la fraternité St Pie X avaient toujours été maintenues, mais se sont raffermies avec Benoit XVI. Son élection avait été saluée par Mgr Fellay, ainsi que sa visite en France. Après l'épisode de l'ultimatum en Juin 2008, les négociations avançant, la fraternité St Pie X avait organisé un bouquet de plus d'un million de chapelets (ils en ont finalement obtenu 1,7 millions auxquels, honte sur moi, je n'ai pas participés) à l'intention du retrait des excommunications, accompagnés d'une lettre, auquel le communiqué du Vatican fait référence, réaffirmant la volonté de demeurer catholique, ainsi que la primauté du St Père, de la part des autorités de la fraternité St Pie X.

Ces dernières avaient posé comme préalable aux discussions doctrinales sur Vatican II, deux conditions:
- la liberté accordée à tous les prêtres de dire le rite tridentin comme bon leur semble, ce qu'est venu magnifiquement confirmer le Motu Proprio de 2007, on s'en souvient.
- le retrait des excommunications pesant sur la Fraternité St Pie X

Alors que va-t-il se passer, maintenant que les conditions sont remplies ?

Tout d'abord, je vois mal les évêques français rester silencieux face à une telle mesure qui vient remettre en cause tout ce qu'ils ont fait par le passé, tout leur combat. On risque d'entendre toute l'Eglise de France se mobiliser contre cette mesure qu'elle estimera sans doute comme injuste et inutile.

Ensuite, vient la question du statut de la fraternité à laquelle ne répondent pas les différents communiqués. Celle-ci possède ses propres églises et chapelles, parfois des anciennes granges et des garages restaurés, réparties un peu partout sur le territoire français dans de nombreux pays à l'étranger. La messe continuera-t-elle à y être dite ? La question est posée, d'autant que l'on sait que l'épiscopat français n'a jamais souhaité accorder des églises, même vides, à la fraternité. Témoin, l'exemple d'Amiens, où l'évêque risque d'être en difficulté pour continuer à justifier son refus d'accorder une église.

Qu'en sera-t-il des prêtres de la fraternité ? Vont-ils être incardinés, c'est à dire placés sous l'autorité de l'évêque du lieu ? Ou comme c'est plus probable, la fraternité va-t-elle constituer ce qu'on appelle une prélature personnelle, statut crée spécialement pour l'Opus Dei, c'est à dire que la fraternité relèvera directement de l'autorité pontificale ? Bien malin qui pourrait le dire.

Enfin, il est certain que les discussions sur Vatican II vont pouvoir s'engager véritablement, dans un climat de confiance établi. En espérant que les modalités et propositions concrètes se fassent rapidement du côté de la fraternité St Pie X.

D'ailleurs, chez celle-ci, il est probable que cette annonce fera également des remous. La grande majorité de la fraternité suit Mgr Fellay, mais une minorité décidera probablement de refuser cette main tendue, et d'aller jusqu'au bout de sa logique qu'on peut qualifier de "sédévacantistes". Idéologie (sédévacantisme =  vacance du siège) qui estime que depuis Vatican II, il n'y a plus de pape à Rome, et que les papes suivants sont des usurpateurs.

Le pape Benoit XVI continue donc son oeuvre réformatrice de haute volée, passant outre tous les commentaires, il travaille à rétablir l'unité de l'Eglise, avant toute chose. Ce sont 20 ans de combat qui se concluent aujourd'hui ; ce pape reste et demeure une bénédiction. Avant le Te Deum à St Nicolas du Chardonnet et les messes d'action de grâce, un seul mot s'impose :

MERCI BENOIT XVI !

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Ad Majorem Dei Gloriam !

DEO GRATIAS !



Rédigé par Polydamas

Publié dans #Religion

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J
Vous écrivez que la majorité des fidèles de la Frat' suit Mgr Fellay dans son dialogue avec Rome. Pourtant, les autres évêques schismatiques ne semblent pas du même avis: Mgr Willamson et Mgr Tissier de Mallerais, ce dernier doutant de la "validité de l'élection de Ratzinger".
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P
<br /> Oui, et alors ? Mgrs Tissier de Mallerais et Williamson ne représentent qu'eux-mêmes. D'autant qu'à ma connaissance, Mgr Williamson n'a rien dit allant à l'encontre du supérieur de la FSSPX.<br /> <br /> <br />
G
Si vous avez des informations que je n'ai pas, faites passer, je suis preneur. Le Pape a certainement le pouvoir de mettre en place un nouveau nouveau ordo missae s'il le souhaite, et je ne serais pas nécessairement fermé à ce genre d'idée (quoique... la messe de mon enfance me manquerait probablement... chacun son tour, me direz-vous :-).Ce que je voulais dire, c'est que Benoît XVI ne peut pas se permettre de donner l'impression que les traditionnalistes peuvent déterminer sa conduite. Sinon, la réaction à l'intérieur comme à l'extérieur de l'Eglise dépasserait de beaucoup l'avalanche de reproches qu'il a reçus ces derniers jours.
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P
<br /> Et alors ? La probabilité d'un schisme est nulle...<br /> <br /> <br />
G
@ vhp & Polydamas: il est bien normal que sur le fond, Benoît XVI souhaite imprimer sa marque, et il est possible que cela inclue des changements dans la façon de mettre en oeuvre Vatican II. Je ne veux pas spéculer, comme vhp semble le faire, sur ses intentions.Par contre, là où je ne vous suis pas, c'est sur la notion de "pousser le Vatican" ou d'utiliser les discussions avec la FSSPX pour faire des inflexions dans la liturgie par exemple. Le Pape est, je crois, assez fin politique pour comprendre que cela ne passerait pas facilement. En fait, si cela apparaissait comme lié à une pression exercée par la FSSPX, ou à une négociation quelconque avec cette dernière, l'échec serait assuré. On verra bien...
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P
<br /> Des inflexions dans la liturgie ? Alors que beaucoup anticipent la création d'un troisième rite, synthétisant le meilleur du NOM et du VOM ?<br /> <br /> <br />
V
@Gwynfrid :"Les discussions pourraient difficilement porter sur l'interprétation de Vatican II: Je vois mal Benoît XVI annoncer qu'après discussion, il va changer son interprétation et celle de ses prédécesseurs"Justement, quand Benoit XVI parle de Vatican II, il a clairement autre chose en tête qu'un Mgr Rouet ou qu'un éditorialiste de La Croix qui emploie le même terme. C'était le sujet de son discours de décembre 2005 sur "herméneutique de la continuité". De toute évidence, le Pape va utiliser les "discussions" avec la FSSPX pour faire avancer son interprétation du Concile, interprétation à laquelle les tradis n'ont pas grand chose à redire. On peut s'attendre dans les mois ou années à venir à des déclarations de la curie sur le "sens veritable de l'oecuménisme", sur "la saine collegialité (cum Petro et sub Petro)", etcetera...
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P
<br /> + 1<br /> <br /> <br />
G
Les discussions pourraient difficilement porter sur l'interprétation de Vatican II: Je vois mal Benoît XVI annoncer qu'après discussion, il va changer son interprétation et celle de ses prédécesseurs.Par contre il est raisonnable de s'attendre à une négociation sur le forme que pourrait prendre le retour de la FSSPX dans l'Eglise: fin du suspens a divinis, prélature personnelle ou pas, relations avec les évêques locaux, et surtout, conditions sous lesquelles les prêtres et évêques FSSPX seraient autorisés à s'exprimer, notamment s'ils souhaitent continuer à émettre des "réserves" au sujet du concile (je ne vois de leur part aucun souhait de s'"aligner" purement et simplement). Je ne crois pas Benoît XVI assez imprudent pour laisser revenir les brebis égarées sans prendre quelques garanties.
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P
<br /> Etant donné que personne n'a la même interprétation de Vatican II, pousser le Vatican à établir une interprétation plus ou moins définitive du concile ne me parait pas aberrant. C'est déjà arrivé<br /> par le passé. Enfin, oui, les points les plus difficiles restent les relations avec les évêques locaux.<br /> <br /> <br />