Le problème de la communion dans la main

Publié le 20 Avril 2008

C'est l'une des choses qui me heurtent le plus dans le nouveau ordo missae.

Mgr Ranjith disait, il y a quelques mois, "la communion dans la main fait perdre la Foi en la Présence Réelle". C'est peut-être un peu rapide, dit ainsi, mais ce n'est pas forcèment faux. Car la communion dans la main est importante  comme le sont toutes les autres formes de respect due à la présence réelle, comme les génuflexions ou les signes de croix. Parce que la forme conditionne le respect que l'on aura ensuite pour le fond.

Si l'on n'adopte pas les signes de respect auxquels Dieu a droit, c'est l'idée de Dieu elle-même qui tend à s'amoindrir, à se réduire, se rapprochant ainsi de la conception protestante de l'Eucharistie, qu'on sait être rien de plus qu'un symbole. Or, la communion dans la main vient justement raffermir et confirmer ce sentiment qu'il s'agit d'un élément comme un autre.

Il ne faut pas oublier non plus que si les prêtres ont les mains consacrées, c'est justement pour pouvoir toucher les Saintes Espèces, et les objets liturgiques consacrés. Un enfant de choeur, théoriquement, n'a pas le droit de toucher un ciboire ou un calice en mains propres, pour cela, il doit porter des gants blancs (j'avoue que je ne l'ai jamais vu faire dans une paroisse moderniste). On comprend donc que si, seul le prêtre a le droit de consacrer l'hostie, et de pouvoir y toucher, ce n'est pas pour que tout le monde puisse la recvoir dans ses mains, lors de la communion.

Ce geste n'est rien d'autre qu'une concession faite à l'esprit du temps. Sous prétexte de revenir aux origines, il a été décidé de tolérer la communion aux Stes Espèces dans la main, après Vatican II (le concile n'y est pour rien dans cette mesure). A cet égard il faut lire l'instruction Memoriale Domini de Mai 1969 qui chante les louanges de la communion dans la bouche:

De plus, cette façon de faire, qui doit déjà être considérée comme traditionnelle, assure plus efficacement que la Sainte Communion soit distribuée avec le respect, le décorum et la dignité qui lui conviennent ; que soit écarté tout danger de profanation des espèces eucharistiques, dans lesquelles, « d'une façon unique, totalement et intégralement le Christ, Dieu et homme, se trouve présent substantiellement et sous un mode permanent » [9] ; et qu'enfin soit attentivement respecté le soin que l'Église a toujours recommande à l'égard des fragments de Pain consacré : « Ce que tu as laissé tomber, considère que c'est comme une partie de tes membres qui vient à te manquer »
Et en-dessous, malgré un ferme rappel, c'est le revirement:
Aussi, le Saint-Siège exhorte-t-il vivement les évêques, les prêtres et les fidèles à respecter attentivement la loi toujours en vigueur (la communion dans la bouche) et qui se trouve confirmée de nouveau, en prenant en considération tant le jugement émis par la majorité de l'épiscopat catholique que la forme utilisée actuellement dans la sainte liturgie, et enfin le bien commun de l'Église.

Mais là où s'est déjà introduit un usage différent - celui de déposer la Sainte Communion dans la main - le Saint-Siège, afin d'aider les Conférences épiscopales à accomplir leur tâche pastorale, devenue souvent plus difficile dans les circonstances actuelles, confie à ces mêmes Conférences la charge et le devoir de peser avec soin les circonstances particulières qui pourraient exister, à condition cependant d'écarter tout risque de manque de respect ou d'opinions fausses qui pourraient s'insinuer dans les esprits au sujet de la Très Sainte Eucharistie, et d'éviter soigneusement tous autres inconvénients.


Première réflexion, on se demande bien en quoi les circonstances actuelles, plus difficiles qu'auparavant, justifierait un changement de règle. Quoi ? Notre époque est-elle si spéciale qu'elle mériterait un renversement des règles ?

En outre, sans faire mon grincheux, nous avons ici une stratégie typiquement moderniste, qui est un petit bijou de double langage. On honore et on respecte l'ancienne façon de faire, mais on autorise et on tolère la nouvelle mode pour, bien évidemment, quelques petites exceptions locales. Cette tolérance obtenue, les exceptions se transforment vite en règle générale quasiment unanimement respectée, l'ancienne règle devenant, elle, l'exception.

Un bijou, vous dis-je.

A cela vient s'ajouter également les couplets sur la soi-disante origine historique, justificatif facile permettant de clouer le bec à toute personne un peu trop attaché au rit tridentin. Origine selon laquelle les premiers chrétiens communiaient dans la main. Outre que ce fait ne repose sur rien d'autre que des présomptions, il semble établi, d'après quelques écrits des papes des premiers siècles, que la communion dans la bouche  était déjà mise en oeuvre. Au IVe siècle. Un texte de St Cyrille viendrait confirmer l'opinion des partisans de la communion dans la main, texte dont l'authenticité est contestée. Mais il est bizarre que les partisans de la communion dans la main utilisent St Cyrille, mais dans le même temps, n'aient que faire de tous les écrits des papes et des saints qui, depuis cette époque, ont dit exactement le contraire.

Bien évidemment, je passe sur les excès qu'on a pu constater, ici et ailleurs, certaines bonnes âmes se permettant de mettre l'hostie dans leur sac, et vient à perdre chez les fidèles la croyance de la présence divine dans les Saintes Espèces. Cependant, par rapport au pire qu'on a pu connaitre, il me semble que les choses ont globalement changé, les prêtres faisant désormais plus attention par le passé.

Et en effet, ce texte de Mgr Ranjith est très clair:

« Je crois que le temps est venu d’évaluer cette pratique et de la revoir, et si nécessaire, de l’abandonner. »

« Maintenant, plus que jamais, il est nécessaire d’aider les fidèles à renouveler une foi vive en la présence du Christ dans les espèces eucharistiques, dans le but de renforcer la vie même de l’Eglise et de la défendre au milieu des dangereuses distorsions de la foi. »


Alors, comment faut-il recevoir la communion ? Mgr Ranjith y répond:

«l’Eucharistie, pain transsubstantié dans le corps du Christ et vin transsubstantié dans le sang du Christ, Dieu au milieu de nous, doit être reçu avec crainte révérencielle et dans une attitude d’humble adoration ».

Et, dans la bouche, c'est encore mieux.

Pour ceux qui souhaiteraient approfondir le problème, notamment sur la controverse historique, je leur recommanderai de parcourir cette page et celle-ci.

Rédigé par Polydamas

Publié dans #Religion

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N
mais c est comme la confession auparavant on la faisait à genoux en signe de penitence ,maintenant la plupart du temps on est assis confortablement sur une chaise ,comme à l heure du the
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D
oui, tout à fait d'accord avec vous, ce n'est pas QUE le signe d'un profond respect, mais c'est avant tout la garantie que la personne ne va pas faire un autre usage de l'Hostie, et je reconnais que ça suffirait, sans cette parole de Jésus, à me faire préférer cette façon de faire; du coup, il faudrait que ce soit obligatoire, le fait de laisser le choix pour que chacun exprime son respect comme il l'entend ne serait plus possible.On peut aussi entendre que si Jésus laisse chacun exprimer son respect, comme il veut absolument que nous soyons libres, il laisse aussi chacun exprimer sa haine, et il a peut-être une souffrance particulière, une sorte de Passion réactualisée, dans la compassion qu'il éprouve face à ceux qui s'en prennent à Lui jusque dans son Saint Sacrement: Il est resté avec nous jusqu'à la fin des temps: c'est pour ces personnes là aussi, il ne désespère pas de les sauver aussi. Il y a d'ailleurs eu des miracles eucharistiques bouleversants à partir d'Hosties qui avaient été emportées dans ce but; j'ai en mémoire une femme qui, sur le conseil d'une sorcière, peut-être pour que son mari lui revienne, avait fait "cuire" l'Hostie dans une poèle. L'Hostie s'est mise à répandre du sang en telle quantité que ça a coulé jusque dans la rue, et la femme a été convertie et tout le vilage e été renouvelé. C'est un mystère que cette liberté dont Dieu nous a "affublés", liberté qui nous fait craindre le pire, et qui pourtant est la seule condition de notre amour. Il est bon d'y penser lors des préparations au mariage: est-ce que je cherche à manipuler ma fiancée pour qu'elle ne parte pas, ou est-ce que je laisse le Seigneur éprouver la qualité de son (et mon) amour afin d'être sûr que celui-ci est libre? ...au risque de découvrir que ce n'est pas de l'amour!quand on applique cela au Seigneur et à son Eglise, via toutes les licences qu'il nous accorde pour pécher, c'est vrai que c'est abyssal.C'est vrai qu'à Rome, on communie dans la bouche, en principe.
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D
et je suis aussi une adepte de Redemptoris Sacramentum!
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D
Je ne suis pas du tout gênée par la communion sur la langue, c'est généralement signe d'un profond respect, et c'est ça qui est important;mais dans le petit journal de Ste Faustine, il y a un passage qui m'a interpelée, comme si Jésus voulait nous dire quelque chose pour notre époque à ce sujet (à l'époque, le problème ne se posait pas):p 95 et 96 de la version française, au n°160 : en gros, elle communiait sur la langue (c'était avant le concile), mais le prêtre laisse tomber une deuxième hostie sur sa manche, qui atterrit ensuite dans sa main, et elle ne sait pas que faire, puis elle entend ces paroles venant de l’Hostie: “Je désirais reposer sur tes mains et pas seulement dans ton coeur.”. Et une description de l'amour qu'elle ressent toute la journée, etc...Je crois que Jésus n'a pas fait ça pour rien...D'autre part, comme une boutade, mais c'est assez vrai quand même (et St Jacques ne me contredira pas) je trouve que j'ai fait plus de péchés avec ma langue qu'avec ma main, et moins de bien aussi, et que donc laisser Jésus reposer un instant sur ma main et le regarder, je trouve que c'est plutôt une bonne chose; bien sûr, on n'en est pas dignes, mais on est encore moins dignes de le manger, et pourtant, c'est lui qui l'a voulu ainsi;On est un peu comme St Pierre qui ne voulait pas se laisser laver les pieds, ce n'est pas une attitude fausse, mais Jésus est plus grand que ce que l'on peut comprendre!Perso, je préfère le geste de recevoir l'hostie dans ma main. je le trouve plus pudique que d'ouvrir ma bouche devant le prêtre. Même si je fréquente aussi les abbayes bénédictines où les offices sont en latin. mais je ne suis pas une référence, je suis une convertie...
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P
<br /> Très bien, vous, vous avez une bonne mentalité, c'est loin d'être le cas pour tous. Or la communion sur la langue est le moyen de s'assurer que tout se passe pour le mieux.<br /> <br /> <br />
S
tout est question de sensibilité.Je peux dire exactement le contraire de ce qui est dit ici.- La communion dans la main ferait perdre la foi dans la présence réèlle ? Oh non, pour moi c'est le contraire : je crois beaucoup mieux en la présence réèlle depuis que je communie dans la main. - La communion dans la bouche est bien plus respectueuse ? Non, pour moi c'est la communion dans la main qui est plus respectueuse. Je me mets dans l'état d'esprit de la pécheresse qui a touché le bas de la robe du Christ.- Dans la main, on me pense pas bien à ce qu'on fait ? Pas du tout, on ne pense plus à ouvrir la bouche assez grande et tirer la langue suffisamment et donc on se recentre, justement, sur la présence réèlle, sur l'adoration. - Dans la main on la met dans son sac... : Et dans la bouche, on peut aller cracher dehors...on dans sa main !- La bouche plus digne que la main : alors là...! ça reste à voir.etc. Pour moi c'est beaucoup plus digne de communier dans la main, beaucoup plus beau, plus profitable,  et je continuerai. Mais je ne jette pas la pierre à ceux qui communient dans la bouche. (en réponse à quelqu'un qui disait ne pas jeter la pierre à ceux qui communient dans la main). Je les plains juste : ils ne savent pas de quoi ils se privent.
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