Ne nous faisons pas d'illusions sur la Chine

Publié le 5 Janvier 2007

Trés bon article de Libé, qui confirme ce que j'ai pu voir en Chine, état dans lequel la justice est encore embryonnaire, et les backchiches trés nombreux. C'est loin d'être la panacée que l'on pourrait croire au prime abord.

En outre, on observe ici la situation typique que l'on a pu constater avec les call-centers délocalisés au Maghreb, et les problèmes de culture inhérents à la délocalisation. Il est arrivé que des voyageurs demandant par téléphone un taxi pour aller de la Gare St Lazare au Louvre se sont vu demander dans quelle ville ils étaient...
 

 
Des meubles qui reposent pied en France
Après cinq ans de délocalisation en Chine, Samas, le spécialiste européen du mobilier de bureau, a fait ses comptes. Et revient dans l'Oise.
Par Sonya FAURE

L'année dernière, les 15 000 m2 de l'usine de Noyon (Oise) paraissaient presque vides. Les commandes se réduisaient, le travail manquait. «Rapidement, c'est devenu comme une psychose», témoigne la directrice des ressources humaines. Puis la direction de Samas France, filiale du numéro 1 européen du mobilier de bureau, a décidé de rapatrier en France une partie de la production délocalisée en Chine cinq ans plus tôt. Depuis septembre, Noyon et ses 150 salariés tournent à plein.

«On ne fait pas de patriotisme économique, précise Valentin Schmitt, directeur des opérations de Samas France. On a pesé le pour et le contre en faisant fi de tous les dogmes : "Délocaliser rend plus compétitif", "L'industrie n'a plus d'avenir en France"...» Après cette «pesée», la relocalisation s'est imposée. Driss Jaouze, délégué syndical CFDT et salarié à Noyon depuis 1972, ne parle plus que de «la confiance» que les dirigeants ont faite à son usine. «On ne pourra jamais être aussi rentables que les Chinois, mais on va se rattraper grâce à une meilleure organisation.»

«Compétences accumulées». Au début des années 2000, Samas France décide de faire construire ses caissons et ses piétements de bureaux près de Canton, en Chine, pour économiser en salaires. Quatre ans plus tard, Samas France dépose le bilan. Et après un redressement judiciaire, la nouvelle direction décide de remettre à plat cette affaire de déloc...

L'activité de l'usine de Noyon ne suffit plus à rentabiliser les équipements, ni à occuper les salariés, en chômage partiel un jour par semaine. Il fallait faire un choix : délocaliser totalement en Chine et fermer l'usine de Noyon. Ou au contraire, relocaliser dans l'Oise. «L'une des marques de notre groupe, Ronéo, existe depuis deux cent soixante ans, explique Valentin Schmitt, directeur des opérations . En Chine, les gains sur les coûts salariaux sont évidents. Mais une entreprise, c'est aussi une histoire, des compétences accumulées. En fermant une usine, on les perd sans pouvoir les récupérer. On s'est rendu compte que cette délocalisation posait pas mal de problèmes.»

Les coûts de transport d'abord. «Ce n'est pas des jeans qu'on fabrique, ce sont des caissons de bureaux», lance Driss Jaouze. Et ça fait toute la différence : si ramener des puces électroniques de Thaïlande peut s'avérer rentable, pour les meubles plus volumineux, c'est une autre affaire. De la Chine à Noyon, cinq semaines de bateau. Et les prix du baril de pétrole qui ne cessent d'augmenter. «Vu l'ampleur des questions environnementales aujourd'hui, on a fait le pari que dans un avenir proche, les politiques de transport évolueront. Une taxe sur les billets d'avion vient d'être votée, pourquoi pas sur tous les moyens de transports ? Pour caricaturer, nous préférons payer nos équipes que le pétrole.» 

Autre sujet d'inquiétude : la réactivité de l'entreprise. La plupart des clients de Samas France sont cotés au CAC 40. Et soucieux de leur image. Ils réclament un mobilier à leur couleur, à leur logo. «Nos produits doivent être de plus en plus personnalisés, poursuit Valentin Schmitt. On le sait, les clients réclament un service plus qu'un produit. Ce qui suppose une proximité avec eux. Il faut pouvoir leur présenter un prototype en un temps record, qu'ils le montent in situ, le fassent valider par leurs salariés.» 

Pour contourner les difficultés de communication avec ses partenaires asiatiques, Samas envoie régulièrement ses équipes sur place. Ce qui coûte de l'argent et du temps. «Entre le moment où nous recevons un plan du bureau à construire et celui où nous livrons une démo à l'entreprise, il nous suffit de trois ou quatre jours quand il est monté en France. Contre huit semaines pour la Chine. Aucun client n'accepte d'attendre autant.» En parallèle à la relocalisation, Samas France a mené une réorganisation de sa production. Les salariés de Noyon ont perdu de leur polyvalence, le travail a été rationalisé. Pour rendre les salariés «plus performants», explique la DRH du site. «50 % de l'écart de coût a été trouvé dans l'amélioration du process. On considère qu'on gagnera les 50 % restants grâce à la baisse des coûts du transport», rapporte Valentin Schmitt.

Coûts cachés. 
Cette relocalisation ne serait pas un cas marginal. «Beaucoup d'entreprises s'engagent à l'étranger pour rapidement découvrir que leur choix n'était pas très judicieux, commente l'économiste Olivier Bouba-Olga (1). Leur raisonnement de base est souvent partiel. On évalue facilement les gains qu'on tirera du coût du travail. Mais on néglige tous les coûts cachés : les problèmes de qualité, le prix de formation de la main-d'oeuvre, le taux de change, les assurances, les transports... Tout dépend du secteur : le coût de la main-d'oeuvre est-il prépondérant ? A-t-on besoin d'une grande proximité avec le client ?» 

Une étude du cabinet McKinsey réalisée aux Etats-Unis en 2005 montre l'écart entre la perception des entreprises et la réalité : interrogés, les chefs d'entreprises californiens du secteur plastique estiment qu'ils feraient un gain de coût de 22 % en délocalisant en Asie. Après études des coûts cachés (logistique, assurance, formation, défauts), les chercheurs estiment qu'ils n'en gagneraient que 11 %.

Et s'ils réorganisaient, en Californie, leur appareil productif pour le rendre plus rentable, ils n'en gagneraient plus que 3 %... «Tout cela explique que les délocalisations ne pèsent pas aussi lourd qu'on le dit sur le marché de l'emploi, assure l'économiste. Les délocalisations vers les pays en développement ne représentent que 5 % des destructions d'emplois sur le total des restructurations des Quinze.» Et que certains départs se finissent en retour.

(1) Son blog : obouba.over-blog.com
 

Ainsi, cet article montre bien que la seule compétence qu'il faut développer en Europe est bien la qualité, et qu'il faut investir en priorité sur la valeur ajoutée. Il est clair que les industries à faible valeur ajoutée, nécessitant une formation réduite sont condamnées à terme à s'expatrier.

A l'heure de la mondialisation, une stratégie de diversification et de différenciation, comme l'a fait cette entreprise, est la seule capable de freiner les délocalisations.

Rédigé par Polydamas

Publié dans #Finance

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P
A voir sur le sujet<br /> La Chine sera-t-elle notre cauchemard de Cohen et (?) Adrian. <br /> Eclairant
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A
Evidemment ! c'est ce que je me tue à dire à tous les psychotiques des délocalisation !il faut faire autre chose et bien le faire.....reconversion et innovation !Toutes les entreprises de pointe qui utilisent des technologies nouvelles ne délocalisent pas vu que peu de pays maitrisent le savoir faire.sinon pour libé, en effet, c'est pas terrible!!!....je préfère de loin le Monde !!! (je rigole...je lis libé tous les jours aussi :)
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D
Article très intéressant en effet. Ainsi non content de lire l'imMonde tu lis aussi l'Aberration. Tu es fichu mon pauvre Polydamas. A quoi cela t'a-t-il servi de fréquenter les bons pères? Il faut dire qu'il y a tant de curés progressistes!... (ps: tu as il y a longtemps publié un billet très intéressant sur Dien-Bien-Phu. Je l'ai lu et commenté des mois après sa parution mais je ne le retrouve pas dans tes archives. Peux-tu m'en donner la date? Merci)
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P
Je sais, j'aggrave mon cas.... ;-)Sinon l'article sur Dien Bien est ici. Il est facile de le retrouver, c'est l'un de mes rares billets classé en Histoire.