La tragédie de Dien Bien Phu

Publié le 26 Avril 2006

Terre de souffrances et d'indifférence,
Terre où la boue et les corps sont à jamais mêlés.

Cette ville stratégique, qui avait déjà vu des combats lors de la seconde guerre mondiale, à l'intersection des routes entre le Laos, la Chine et le Vietnam est le lieu de la plus célèbre bataille de la guerre d'Indochine, qui a vu la défaite des Français. La fierté du rémige communiste est telle, que l'on peut observer dans les rues de cette bourgade des drapeaux appelant à fêter bientôt les 52 ans de la victoire. Autre point significatif: c'est une petite ville qui dispose d'infrastructures que l'on voit rarement dans le reste du Vietnam.

La visite de Dien Bien Phu même se fait assez rapidement. Entre le musée, les mémoriaux français et vietnamiens, le cimetière et la reconstitution du PC du général de Castries, il est assez rapide de tout voir. Mais l'intérêt, à mon sens, n'est pas là.
Il réside davantage, en tant qu'amateur d'histoire, dans la visite des points d'appui, ou de ce qu'il en reste, afin de comprendre l'encerclement et l'évolution de la bataille. Par exemple, Eliane 2, qui a été l'une des batailles les plus dures de Dien Bien Phu est resté dans l'état dans lequel elle a été prise.

Je n'ai pas eu l'opportunité de me recueillir sur les champs de bataille de la guerre de 14, mais je pense que les tranchées d'Eliane sont largement comparables aux tranchées de Verdun. Pour reconnaître les différentes collines, qui ont vu les combats de Mars à Mai 1954, la carte est la seule alliée possible, les points d'appui, lorsqu'ils ne sont pas recouverts d'immeubles, n'etant signalé que par de trop rares plaques, que je n'ai pu voir qu'à Isabelle ou à Eliane.


Lorsque l'on est sur place, la sévérité paraît justifiée à l'égard du Général Navarre, qui avait décidé la création du camp retranché de Dien Bien Phu. En effet son intention initiale était de recommencer, prés du Laos, pays allié en grande difficulté en cette fin d'année 1953, le coup de la bataille de Nasan, qui avait vu la victoire du camp retranché français assiégé par le Vietminh. Seule différence, et de taille: Nasan est localisé non loin de Son La, qui se situe à 300 kilométres de l'aéroport d'Hanoï, soit 150 km de moins que la distance Dien Bien Phu - Hanoï.

Or la bataille de Nasan avait été gagnée avant tout par l'aviation, qui avait bombardé les viets à moins de 150 m des lignes françaises, coupant court à tous les assauts. Et, pour le malheur des 15 000 soldats français de Dien Bien Phu, les avions français étaient tous en limite de portée au-dessus de Dien Bien Phu, incapables de rester plus de 10 minutes au-dessus du champ de bataille.

Par ailleurs, Navarre envisageait Dien Bien Phu comme un point de fixation qui devait permettre à des opérations d'envergure plus importantes de se dérouler dans le delta du Mekong. En conséquence, il n'avait pas anticipé de colonne pour secourir le camp retranché. Il était parti également du principe que les forces viets, trop loin de leurs bases, ne pourraient acheminer toute la logistique nécessaire dans cette partie isolée du Vietnam, chose que les services de renseignements avait contredite à maintes reprises.


Cependant, au niveau international, l'ouverture concommitante de la conférence de Genève incita les responsables viets à déclencher un coup de boutoir susceptible de faire pencher la balance du côté communiste à la table des négociations. Navarre n'avait donc pas vu que la bataille décisive ne se situait pas à l'endroit qu'il avait escompté.

Giap entoura le camp avec une armée de 50 000 hommes et s'installa sur les montagnes alentours pour bombarder les fortifications. Aucun détachement et renforts importants ne venant au secours du camp, la partie était jouée, quoique le Colonel de Castries puisse faire en le commandant. Dien Bien Phu tint deux mois, ce qui représente une véritable performance. Une remarque qu'il faut souligner: l'armée française s'est extremement bien battue, notamment les légionnaires, la bataille cessant du fait de manque de munitions et de la fatigue des combattants.

Contrairement à ce qu'affirme le général Giap dans ses mémoires, je tiens à signaler que les camps viets ont tué plus de 6 000 hommes, alors que la bataille n'en avait tué "que" 4 000 parmi les forces françaises. Les forces ennemies ont perdu 10 000 d'entre eux sur la plaine des Jarres.

Pour plus d'informations, je vous recommande vivement cet article lumineux et le bouquin de Bernard Fall sur Dien Bien Phu. Enfin le site officiel de la bataille m'a permis de mieux comprendre les événements aboutissant à cette tragédie.

Rédigé par Polydamas

Publié dans #Histoire

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D
Très intéressant cet article découvert avec...quatre mois de retard. En plus du manque de munitions et de la fatigue des combattants français on peut ajouter l'arrivée des pluies qui transforma le camp retranché en un bourbier invivable. C'est fort bien montré par Shoendorffer dans son film "Dien Bien Phu", mais les plus jeunes auront du mal à comprendre pourquoi les avions ne pouvaient pratiquement faire que l'aller-retour. Nos avions étaient anciens et les américains n'ont pas fait beaucoup d'efforts pour moderniser notre armement. La France fut même obligée d'avoir recours à des avions privés pilotés par des mercenaires américains pour appuyer notre propre aviation, ce qui fit penser que les américains nous avaient aidés, mais c'est inexact.
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