A propos d'Ingrid Bétancourt

Publié le 23 Février 2008

Via le forum des PF.



Lettre ouverte au COMITE POUR LA LIBERATION D’INGRID BETANCOURT

22 Feb 2008 21:15:02
Ce texte a été écrit et signé par un groupe de Colombiennes résidant en France:


Paris, le 22 février 2008

Le portrait géant d'Ingrid Betancourt installé sur la façade de l’Hôtel de Ville de Paris témoigne de l'élan humaniste et solidaire qu'a déclenché en France son enlèvement par les FARC (Forces armées révolutionnaires de Colombie) en février 2002. Votre comité a su porter ce drame au cœur de l'opinion publique française et internationale et, il est juste de le reconnaître, celui des plus de 3000 otages retenus par ce groupe et l'ELN (Armée de Libération Nationale) dans les jungles colombiennes. Votre travail et la remarquable médiatisation que vous avez réussi à donner à votre lutte pour Ingrid a donné une dimension internationale au drame des victimes de cette pratique ignoble, déshumanisante et contraire au respect des Droits de l'Homme.

En tant que citoyennes colombiennes, nous approuvons le principe sur lequel se fondent la démarche et les actes et rassemblements que votre Comité et la Fédération Internationale des Comités d'Ingrid Betancourt avez organisés dans différentes villes de France et d'Europe visant à la libération de Mme Betancourt.  Votre action est généreuse et courageuse et il faut la continuer.

A la veille de la date anniversaire de la malencontreuse décision prise par notre compatriote (rappelons qu'elle est née en Colombie, y a vécu, et détient la nationalité colombienne), puis payée chèrement avec la perte de sa liberté et le malheur de sa famille, et suite à la visite de Monsieur Bernard Kouchner à Bogota, nous souhaiterions que certaines questions que vos déclarations ont soulevées chez la plupart des citoyens colombiens et bien de français, soient discutées sur la place publique, la même place sur laquelle vous avez, par méconnaissance ou par naïveté, dans votre empressement pour atteindre votre objectif, dénigré l'État colombien et porté atteinte à l'estime de notre pays dans la communauté internationale.

Mais avant de poursuivre, permettez-nous de nous identifier. Nous sommes plusieurs Colombiennes résidant en France depuis plusieurs dizaines d'années. Nous nous sommes rencontrées autour de la marche contre les FARC du 4 février 2008, motivées par le désir de voir notre pays vivre en paix, libéré de la violence, d'où qu'elle vienne, avec une démocratie consolidée et tournée vers la prospérité. Nous avons travaillé ensemble, en donnant de notre temps et apportant nos moyens afin d'aider dans l'organisation du rassemblement du 4 février à Paris. Nous avons emboîté le pas de ces jeunes Colombiens qui ont décidé de sortir de leur impuissance, dépasser leurs craintes et leurs différences et, avec eux, faire entendre nos voix à l'intérieur et à l'extérieur de la Colombie.

1. Pourquoi depuis six ans avez-vous laissé entendre que le gouvernement colombien était responsable de la captivité d'Ingrid Betancourt et gardé un silence honteux sur les véritables auteurs, les FARC, sans aucune condamnation publique de ce groupe terroriste ni appel direct aux responsables de son enlèvement ?

2. Au vu de la délicate situation diplomatique entre la Colombie et le Vénézuela, aggravée par les déclarations offensantes et grossières de Monsieur Chavez envers notre Président, pourquoi votre insistance et celle de Mr Kouchner dans l'intervention du Président Bolivarien dans ce dossier ? Ce parti pris serait-il de mise vis-à-vis des affaires intérieures de la France ou de n'importe quel autre pays libre et souverain ?

3. Pourquoi n'ont pas été portées à la connaissance de l'opinion publique française avec la même ampleur que les déclarations tonitruantes de la famille Betancourt, les concessions infructueuses faites aux FARC par le gouvernement Uribe, dont la libération de 150 guérilleros et l'un de ses dirigeants en 2006 ?

4. Estimez-vous qu'un accord humanitaire doit forcément comporter une contrepartie aussi disproportionnée que l'abandon à un groupe terroriste de 800 km² de territoire et le destin de 110.000 personnes, tout cela à moins de 300 km de la 3ème ville la plus importante de notre pays ?

5. Pourquoi dans votre communiqué du 30 janvier avez vous déformé à volonté les mobiles et la façon dont a été organisée la marche du 4 février à laquelle plus de 10 millions de Colombiens ont participé pour dire NON AUX FARC ?  Dans plus de 125 villes du monde où des colombiens et leurs amis ont manifesté leur rejet des FARC, la presse française est la seule à avoir présenté comme un fait avéré les propos mensongers d'Astrid Betancourt. C'est ainsi que ce moment historique de la Colombie est passé presque inaperçu en France. Où est la logique dans tout cela ?

6. Dernière question, quelle serait votre position vis-à-vis de la complexe situation colombienne si au lieu de vivre dans une France libre de groupes terroristes, vous étiez dans notre pays et vous subissiez les conséquences de la violence que nous frappe quotidiennement depuis plus de 40 ans, sans parler des victimes, la plupart des paysans ?


Nous attendons vos réponses et vous remercions par avance de tenir compte des propos tenus dans cette lettre sans les déformer ni les utiliser à notre encontre. Nous restons persuadés que l'action conjuguée des citoyens colombiens et d'autres pays du monde sera décisive pour obtenir la libération des otages. Oeuvrons tous ensemble pour aider notre gouvernement dans cette noble cause. Merci.

Clara Cardenas, Ma.Margarita Quillet, Ma. Clara Afanador, Maria Isabel  Otalora ,Patricia O’Rourke


 

Rédigé par Polydamas

Publié dans #Relations internationales

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J
à Polydamasêtre qualifié de "terroriste" plutôt que de "belligérent" (ce qui ne vaut pas blanc-seing pour autant) est extrêmement important, ça signifie qu'on peut saisir tes biens et arrêter les membres de ton organisation sans autre forme de procès. Les FARCs sont à juste titre considérés comme terroriste depuis l'enlèvement barbare d'Ingrid Bétancourt et Calra Rojas, femmes qui n'étaient pas partie prenante dans leur guerre. à phiconversRecadrons le débat en effet :depuis que Henry Dunant horrifé par la bataille napoléonIII-ième de Solefrino a fondé la croix-rouge jusqu'au rôle d'intermédiaire qu'assume magnifiquement aujourd'hui l'Eglise en Colombie en passant par les conventions de Genève, l'Humanité impose aux belligérents en présence des mini-trêves pour panser ses paies les plus douloureuses.
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P
J-M. Fayard, Il faut recadrer les choses :- c'est au peuple colombien de déterminer qui doit le représenter, pour quelle politique. Ils ont choisi Uribe, par deux fois, pour une politique de fermeté à l'égard des FARC ;- cette politique est payante en termes de sécurité et de développement du pays ;- l'opinion des comités Betancourt, de Sarkozy, de Chavez, de Lipietz et autres est éventuellement intéressante mais n'a aucune vocation à se substituer à celle des Colombiens ;- l'un des nombreux risques du pseudo accord humanitaire est la perpétuation du calvaire infligé à l'immense majorité des otages qui ne seraient pas concernés par un tel "deal", c'est-à-dire les otages "non politiques".Si vous voulez en débattre, voici trois références, dont deux de ma plume :- http://www.agoravox.fr/article.php3?id_article=32155- http://www.agoravox.fr/article.php3?id_article=34681- http://jacquesthomet.unblog.fr/
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J
« En même temps, tu m'accorderas que le point de vue uribiste, en France, on l'entend pas des masses... »Quand on parle espagnol et qu'on fait son possible (en général dérisoire) pour être un maillon de la chaîne de solidarité, on ne le connait que trop et on le conteste.« Sinon, oui, si j'étais dans la position des enfants Betancourt, je ferais tout ce qui est possible pour libérer ma mère. »« Quant à Uribe, je ne suis pas sûr qu'il doive sacrifier sa politique à une otage dont le sort est ultra-médiatisé. Doit-on, lorsqu'on est chef d'un pays, revenir sur la politique qui permet d'éradiquer les terroristes, sous prétexte qu'ils ont enlevé quelqu'un don't le sort est connu en France ? Franchement, je ne pense pas. »Voilà, tu as tout dit dans ta première phrase.Sur ta deuxième phrase, c'est certainement le raisonnement d'Uribe mais encore une fois, il est bien normal pour les soutiens d'Ingrid Bétancourt de faire passer la sauvegarde de sa vie au-dessus de la glaciale (pseudo-)raison d'État.Pseudo raison d'État car rien ne prouve que la stratégie d'Uribe soit la plus à même de résoudre les problèmes de la Colombie.« Le problème est que la médiatisation forcenée que connait son exemple est le meilleur moyen de renchérir le prix de sa libération, de modeste politique verte qu'elle était au moment de se faire enlever, elle devient une figure de proue, voire une figure de la résistance face à Uribe. Ce qui fait qu'elle sera probablement la dernière otage à être libérée par les FARC. »Médiatiser l'otage est sans doute la pire stratégie... après toutes les autres. Tu penses bien que si Uribe ou qui que ce soit venait convaincre la famille Bétancourt qu'ils faisaient fausse route et qu'il y avait un plan bien plus efficace pour atteindre leur but (unique, sans sous-entendu ni ambiguité : la récupérer vivante), ils s'y plieraient dans la seconde.Que cela cause un renchérissement certainement. Mais à combien évalues-tu une vie humaine ? 1 million ça va, 3 millions d'euros c'est trop ? Je ne le crois pas.Mais en ce qui concerne la durée, c'est totalement faux.Premièrement parce qu'il y a hélas des otages qui croupissent dans la jungle depuis bien plus longtemps qu'elle, apparemment l'absence de médiatisation n'est pas si bénéfique que cela...Deuxièmement parce qu'hélas là encore, vu son état de santé, elle ne peut être libérée que bientôt ou jamaisL'otage n'a de valeur tant qu'elle reste vivante. Et c'est là dessus que vajouer la suite de la mobilisation. Depuis la dernière vidéo qu'on a d'elle etle tout récent témoignage de l'ex-sénateur libéré, on sait qu'elle est àbout. Or si elle meurt, c'est une catastrophe non seulement pour safamille, mais aussi pour les FARCS qui se seront définitivement couverts d'infâmie.Le temps joue donc contre eux et pour une libération rapide. Ca c'est la bâton. Lacarotte c'est qu'en échange d'un accord humanitaire ou d'une libérationinconditionnelle des otages, l'Union européenne pourrait lever l'inscriptiondes FARCs dans la liste des organisations terroristes qu'elle avait effectuéejustement en condamnation de l'enlèvement d'Ingrid Bétancourt et Calara Rojas.Là dessus, voir les explications d'Alain Lipietz qui préside la commission du parlementeuropéen qui s'occupe des relations avec l'amérique latine :--------http://lipietz.net/spip.php?page=blog&id_breve=284&cs=print#h4IngridLa déclaration du Président Chavez, selon laquelle la libération deClara Rojas et de la sénatrice Consuelo Gonzalez de Perdomo justifiaitque l'Union européenne retire les Farc de la liste européenne desorganisations terroristes, m'a posé, vous vous en doutez, un sérieuxproblème, que j'ai fait clarifier à la réunion de la délégation pourla Communauté andine (que je préside). Là, j'ai mis cartes sur table,leur dévoilant une partie des négociations que je mène tous azimutspour la libération d'Ingrid depuis cinq ans.J'ai rappelé qu'en tant que Parlement nous n'avons qu'une seule carteà offrir en échange des otages, justement cette sortie de la liste.(La « liste des organisations terroristes » donne le droit aux Etatsmembres de saisir les biens de ces organisations, d'arrêter leursmembres quand ils tombent entre leurs mains, etc). Cela, je l'avaisexpliqué à plusieurs reprises aux différents responsables de la région(dont le Président Chavez) pouvant avoir des contacts avec les Farc,et aux Farc eux-mêmes, y compris après la « fin du premier round » demes négociations, par divers canaux, dont le PC colombien. Mais jen'avais jamais laissé supposer que nous nous contenterions de lalibération de Clara Rojas et d'une seule sénatrice. C'est d'ailleursla position d'Ingrid elle-même [http://lipietz.net/spip.php?article1080 ]. Combien d'otages à libérerunilatéralement ? je suis toujours resté vague en public, mais j'aitoujours cité Ingrid, élue colombienne ayant la nationalité européenne(Voir par exemple ici)Le reste de la délégation écoute oreilles grandes ouvertes, mefélicite pour le sérieux avec lequel j'assume mon rôle de président.Je leur indique que j'avais bien entendu mis au courant mes deuxvice-présidents socialiste et PPE, ainsi que l'ancien président duParlement européen (à l'époque, le socialiste Josep Borrell), que l'onm'avait objecté que la sortie d'un groupe guérillériste de la listedes organisations terroristes poserait le problème d'un précédent pourle Hamas, mais que j'avais découvert, lorsque j'étais allé parrainerles négociations entre le gouvernement colombien et l'ELN à Cuba, eten discutant avec des diplomates plus chevronnés, que la sortie de laliste ne posait pas tant de problèmes : les Ealam Tamouls avaient étésortis de la liste au moment du tsunami.Je demande donc à tous les groupes politiques de s'exprimer un par unsur le compromis suivant : le Parlement européen prendrait positionpour le retrait des Farc de la liste à la condition d'un retour austatu quo ante de janvier 2002 (quand l'Union européenne jouait unrôle médiateur entre le gouvernement colombien et les Farc, alorsconsidérées comme « parties à un conflit armé »). Ce statut leur avaitété retiré, et les Farc avaient été inscrites dans la liste desgroupes terroristes après l'enlèvement d'Ingrid, de Clara et d'autresélus au début 2002. Un par un, les représentants de tous les groupespolitiques approuvent cette position. Je la transmets aussitôt par lescanaux diplomatiques au Président Chavez.À propos d'Ingrid, lisez le minuscule livre par lequel les Editions duSeuil rendent publique l'intégralité de sa lettre à sa mère Yolanda,la « preuve de vie » obtenue par Chavez. Quoi qu'en dise le critiquede Libération, cette lettre est belle d'un bout à l'autre.Il y a aussi des lettres des enfants d'Ingrid. Les enfants, je n'aijamais voulu bavarder avec eux. Un jour j'ai gaffé en parlant troplégèrement à Yolanda, femme d'une lucidité et d'un courage pourtantadmirable, des rythmes (en terme de trimestres plutôt que de jours)]de cette négociation. Dire à des enfants « Votre maman, je crois qu'ona une petite chance de finir par la récupérer, mais vous serez déjàgrands », ça je n'ai jamais eu le courage.Ingrid, on reste avec toi ! 
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P
Je ne vois pas ce qui te permet de dire qu'il s'agit d'une "pseudo" raison d'etat. Uribe n'est pas là pour améliorer le sort de Bétancourt, mais pour améliorer le sort de la Colombie, quoiqu'il puisse en coûter à Betancourt. Evidemment que l'on peut avoir des doutes sur sa stratégie, reste qu'il semblerait qu'il s'agit de la stratégie qui apporte le plus de résultats, comme l'a montré un article du Monde, qui expliquait que la guerilla ne cessait pas de perdre des hommes.Concernant la suite de ton commentaire, je ne suis pas sûr que la carotte soit satisfaisante pour les FARC. Je serais à leur place, qu'on soit considéré ou pas comme des terroristes par l'union européenne, je n'en aurais rien à foutre, ce n'est pas ça qui améliorera mon sort dans la jungle. Après, il est clair que seule la Colombie peut définir quels seraient les termes de la "carotte". Mais l'UE s'agite pour rien, à mon sens. En outre, faut-il te rappeler les risques inconsidérés que Bétancourt a pris ? En tant que libéral, j'ai tout de même du mal à comprendre qu'on se donne autant de mal pour quelqu'un qui a pris sa sécurité aussi aussi à la légère...
J
Quel document décapant : des uribistes qui... défendent Uribe. À peu près aussi inattendu qu'un militant communiste récitant la position officielle du Parti.Vois-tu, le première priorité de la famille d'Ingrid Bétancourt n'est pas de ne pas gêner le gouvernement colombien mais de libérer de toute urgence leur mère, épouse et fille qui après 6 années de détention horrible est sur le point de mourir. En tant que catho, tu ne trouves pas légitime que faire respecter son droit à la vie leur semble plus important qu'une hypothétique "atteinte à l'image de la Colombie" ? (comme si ce n'était pas la réalité de la Colombie qui en tout premier lieu portait atteinte à la Colombie, et non pas ceux qui en parlent). Et comment faire sinon en mettant le maximum de pression sur _tous_ les acteurs susceptibles d'hâter le dénouement de l'accord humanitaire ? Sur ces salopards de FARC. Mais aussi sur Uribe dont l'intransigence a viré depuis bien longtemps à la non-assistence à personne en danger.
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P
En même temps, tu m'accorderas que le point de vue uribiste, en France, on l'entend pas des masses...Sinon, oui, si j'étais dans la position des enfants Betancourt, je ferais tout ce qui est possible pour libérer ma mère. Le problème est que la médiatisation forcenée que connait son exemple est le meilleur moyen de renchérir le prix de sa libération, de modeste politique verte qu'elle était au moment de se faire enlever, elle devient une figure de proue, voire une figure de la résistance face à Uribe. Ce qui fait qu'elle sera probablement la dernière otage à être libérée par les FARC.Quant à Uribe, je ne suis pas sûr qu'il doive sacrifier sa politique à une otage dont le sort est ultra-médiatisé. Doit-on, lorsqu'on est chef d'un pays, revenir sur la politique qui permet d'éradiquer les terroristes, sous prétexte qu'ils ont enlevé quelqu'un don't le sort est connu en France ? Franchement, je ne pense pas.
S
Tout à fait d'accord.J'ai de la famille en Colombie, je peux vous dire qu'ils en ont assez de tout ce tapage autour d'Ingrid Bettencourt.D'autant plus qu'un membre de la famille a été kidnappé et tué par les Farc et que personne n'a jamais levé le petit doigt. C'est parait-il la troisième cause de mortalité en Colombie !...Une fois de plus on (ici le comité pour la libération de IB) fait appel aux sentiments larmoyants et non à la raison.Et pourquoi ne critiquent-ils jamais les Farc ?...Et puis enfin de quoi nous mêlons-nous encore ?...
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