Le même Dieu ?
Publié le 22 Janvier 2008
Sans doute musulmans, juifs et chrétiens ne croient-ils pas en Dieu de la même façon. Mais au fond, qui pourrait contester que c'est bien le même Dieu auquel s'adressent leurs prières ?
Nicolas Sarkozy, discours de Ryad
Votre serviteur le conteste.
Non, ce n'est pas le même Dieu dont il s'agit dans l'Islam, la chrétienté ou le judaïsme. Si encore, on peut comprendre l'erreur en ce qui concerne les juifs et les catholiques, il est impensable d'assimiler Dieu et Allah.
Pourquoi ?
Voilà ce que nous dit le catéchisme du concile de Trente, à propos du Credo.
Je crois en Dieu, le Père tout puissant
Voici le sens de ces paroles: je crois fermement et je confesse sans aucune hésitation Dieu le Père, c’est-à-dire la première Personne de la Sainte Trinité, qui par sa vertu toute puissante a créé de rien le ciel et la terre et tout ce qu’ils renferment, et qui, après avoir tout créé, conserve et gouverne toutes choses.
On observe tout de suite, que dans la notion de Père, c'est la Sainte Trinité auquel le Credo fait référence. Ce qui pose de suite un problème à l'islam. En effet, pour les musulmans eux-même le Dieu trine n'a aucun rapport avec Allah, ils le disent eux-mêmes.
"171. Ô gens du Livre (Chrétiens), n'exagérez pas dans votre religion, et ne dites de Dieu que la vérité. Le Messie Jésus, fils de Marie, n'est qu'un Messager de Dieu, Sa parole qu'Il envoya à
Marie, et un souffle (de vie) venant de Lui. Croyez donc en Dieu et en Ses messagers. Et ne dites pas «Trois». Cessez ! Ce sera meilleur pour vous. Dieu n'est qu'un Dieu unique. Il est
trop glorieux pour avoir un enfant. C'est à Lui qu'appartient tout ce qui est dans les cieux et sur la terre et Dieu suffit comme protecteur .
Mais sur la question, déjà âprement débattue, il m'apparait plus sage de laisser la parole à de brillants théologiens, comme Dom Gérard Calvet.
Les monothéismes adorent-ils le même Dieu ?
Il semble à première vue que oui. Partons d’une définition du monothéisme : « croyance en un Dieu unique ». Les chrétiens croient en un seul Dieu (Credo in unum Deum), juifs et musulmans croient eux aussi en un Dieu unique. Ne peut-on pas en inférer qu’il s’agisse là d’une notion commune aux trois religions et par conséquent d’une base « œcuménique » de départ ?
La Trinité des personnes propre à la foi chrétienne se présenterait alors comme une phase ultérieure, tandis que l’unicité de Dieu offrirait une notion commune initiale sur laquelle les adeptes des trois religions pourraient fusionner.
Le Père Manaranche S.J., dans « Le monothéisme chrétien » (Le Cerf 1985), dénonce vigoureusement cette fausse conception : « De ce fait, la Révélation court le risque de s’ajouter comme un étage à ce rez-de-chaussée indispensable : la Trinité n’influe pas vraiment sur l’Unité, elle ne conduit pas à la repenser de fond en comble. D’où la tendance des apologistes à faire bon marché de la différence chrétienne au nom d’un œcuménisme de courtoisie… ou d’impatience. » (page 18) À la fin de son ouvrage l’auteur poursuit : « Il est impossible pour la chrétienté de penser une divinité hors du jeu de la charité par lequel elle se communique : elle n’existe pas sans le don (d’amour) qu’elle fait d’elle-même et qui est elle-même. Ce qui, en nous, est séparé coïncide en Dieu. » (page 226) Le « Dieu naturel » supposé commun aux « trois religions monothéistes » est un être de raison, une conception purement humaine sans fondement dans la réalité, un Dieu qui n’existe que dans l’esprit de l’homme. À l’appui de cette thèse, le Père Manaranche cite l’orthodoxe Jean Zizoulias : « Il serait impensable de parler du « Dieu un » avant de parler du Dieu qui est « communion », c’est-à-dire de la Sainte Trinité. La Sainte Trinité est un concept ontologiquement primordial et non une notion qui s’ajoute à la substance divine. » (page 227)
Sans doute les manuels de théologie sont bien obligés, pour la clarté du discours, d’étudier séparément le Dieu un et le Dieu trine, mais il ne faut pas que les exposés donnent l’impression que la Trinité est « un correctif ajouté après coup à l’unité divine ». Elle n’est pas « un ajout secondaire ou facultatif ». La Trinité des personnes est l’essence divine. Loin d’être une notion accidentelle, la Trinité est la façon inouïe, unique, inimitable qu’a Dieu d’être un.
Il semble à première vue que oui. Partons d’une définition du monothéisme : « croyance en un Dieu unique ». Les chrétiens croient en un seul Dieu (Credo in unum Deum), juifs et musulmans croient eux aussi en un Dieu unique. Ne peut-on pas en inférer qu’il s’agisse là d’une notion commune aux trois religions et par conséquent d’une base « œcuménique » de départ ?
La Trinité des personnes propre à la foi chrétienne se présenterait alors comme une phase ultérieure, tandis que l’unicité de Dieu offrirait une notion commune initiale sur laquelle les adeptes des trois religions pourraient fusionner.
Le Père Manaranche S.J., dans « Le monothéisme chrétien » (Le Cerf 1985), dénonce vigoureusement cette fausse conception : « De ce fait, la Révélation court le risque de s’ajouter comme un étage à ce rez-de-chaussée indispensable : la Trinité n’influe pas vraiment sur l’Unité, elle ne conduit pas à la repenser de fond en comble. D’où la tendance des apologistes à faire bon marché de la différence chrétienne au nom d’un œcuménisme de courtoisie… ou d’impatience. » (page 18) À la fin de son ouvrage l’auteur poursuit : « Il est impossible pour la chrétienté de penser une divinité hors du jeu de la charité par lequel elle se communique : elle n’existe pas sans le don (d’amour) qu’elle fait d’elle-même et qui est elle-même. Ce qui, en nous, est séparé coïncide en Dieu. » (page 226) Le « Dieu naturel » supposé commun aux « trois religions monothéistes » est un être de raison, une conception purement humaine sans fondement dans la réalité, un Dieu qui n’existe que dans l’esprit de l’homme. À l’appui de cette thèse, le Père Manaranche cite l’orthodoxe Jean Zizoulias : « Il serait impensable de parler du « Dieu un » avant de parler du Dieu qui est « communion », c’est-à-dire de la Sainte Trinité. La Sainte Trinité est un concept ontologiquement primordial et non une notion qui s’ajoute à la substance divine. » (page 227)
Sans doute les manuels de théologie sont bien obligés, pour la clarté du discours, d’étudier séparément le Dieu un et le Dieu trine, mais il ne faut pas que les exposés donnent l’impression que la Trinité est « un correctif ajouté après coup à l’unité divine ». Elle n’est pas « un ajout secondaire ou facultatif ». La Trinité des personnes est l’essence divine. Loin d’être une notion accidentelle, la Trinité est la façon inouïe, unique, inimitable qu’a Dieu d’être un.
En ce sens, il faut bien comprendre que la Trinité n'est pas une qualité de Dieu, mais bien son essence même. C'est là toute la différence, tout ce qui caractérise et distingue le catholicisme des autres religions.
Avec les Juifs, le problème est similaire dans le sens où en refusant le Christ, ils refusent également la nature trinitaire de Dieu. Partant, puisqu'ils reconnaissent Dieu, mais qu'ils refusent de croire que le Christ est la seconde personne de la Ste Trinité, on est contraint de reconnaitre que ce n'est pas le même Dieu auquel les Juifs et les catholiques font référence.
Or ces distinctions vont directement à l'encontre de ce que l'oecuménisme de Vatican II nous a pondu, comme le confirme la déclaration suivante :
"L'eglise regarde aussi avec estime les musulmans, qui adorent le dieu Un, vivant et subsistant, miséricordieux et tout-puissant, créateur du ciel et de ta terre, qui a parlé aux
hommes."
(Déclaration sur l'eglise et les religions non chrétiennes, de Vatican II)
(Déclaration sur l'eglise et les religions non chrétiennes, de Vatican II)
Partant, il est compréhensible que certains traditionnalistes ne souhaitent pas bouger de cette position et ne veulent pas reconnaitre l'oecuménisme de Vatican II, qui s'oppose frontalement à toute la théologie catholique enseignée depuis 1500 ans.