La liberté, selon Léon Bloy

Publié le 22 Juillet 2007

La simple vérité catholique est qu'il faut absolument souffrir pour être sauvé et ce dernier mot implique une nécessité telle que toute la logique humaine mise au service de la métaphysique la plus transcendante ne saurait en fournir l'idée. L'honneur ayant compromis sa destinée éternelle par ce qu'on appelle le Péché, Dieu veut qu'il entre dans l'ordre de la Rédemption. Dieu le veut infiniment.

Alors s'engage une lutte terrible entre le coeur de l'homme qui veut fuir par sa liberté et le coeur de Dieu qui veut se rendre maître du coeur de l'homme par sa puissance. On croit assez facilement que Dieu n'a pas besoin de toute sa force pour dompter les hommes. Cette croyance atteste une ignorance singulière et profonde de ce qu'est l'homme et de ce qu'est Dieu par rapport à lui.

La liberté, ce don prodigieux, incompréhensible, inqualifiable par lequel il nous est donné de vaincre le Père, le Fils et le Saint-Esprit, de tuer le Verbe incarné, de poignarder sept fois l'Immaculée Conception, d'agiter d'un seul mot tous les esprits créés dans les Cieux et dans les enfers, de retenir la Volonté, la Justice, la Miséricorde, la Pitié de Dieu sur ses Lèvres et de les empêcher d'en descendre sur sa création ; cette ineffable liberté n'est rien que ceci : le respect que Dieu a pour nous.

Qu'on essaie un peu de se représenter cela : le Respect de Dieu !

Et ce respect est à un tel point que jamais, depuis la loi de grâce, Il n'a parlé aux hommes avec une autorité absolue, mais au contraire avec la timidité, la douceur et je dirai même, l'obséquiosité d'un solliciteur indigent qu'aucun dégoût ne serait capable de rebuter. Par un décret très mystérieux et très inconcevable de sa volonté éternelle, Dieu semble s'être condamné jusqu'à la fin des temps à n'exercer sur l'homme aucun droit immédiat de maître à serviteur, ni de roi à sujet.

S'il veut nous avoir, il faut qu'il nous séduise, car si sa Majesté ne nous plaît pas, nous pouvons la rejeter de notre présence, la faire souffleter, fouetter et crucifier aux applaudissements de la plus vile canaille. Il ne se défendra pas par sa puissance mais seulement par sa patience et par sa Beauté et c'est ici le combat terrible dont je parlais tout à l'heure.

Entre l'homme revêtu involontairement de sa liberté et Dieu volontairement dépouillé de sa puissance, l'antagonisme est normal, l'attaque et la résistance s'équilibrent raisonnablement et ce perpétuel combat de la nature humaine contre Dieu est la fontaine jaillissante de l'inépuisable Douleur.

Léon Bloy, Le Symbolisme de l'Apparition


Merci à Eymerich du FC.

Rédigé par Polydamas

Publié dans #Religion

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D
Tu as raison Polydamas, notre façon de faire est bien cavalière et il va falloir qu'on s'achète une conduite. On n'a que trop profité de ton libéralisme. Toutes mes excuses. Mais après tout c'est de ta faute, tu n'aurais jamais dû partir en vacances!
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P
Lol.... ;-)
D
@Anastasie : Ah le Mézenc! Il faut le voir au mois de Mai quand il est couvert de jonquilles...et prendre le thé dans le ravissant petit salon de thé des Estables.Vous aussi vous aimez le festival de la Chaise-Dieu... J'ai le souvenir d'une nuit passée à l'hôtel de l'Echo. Je fus réveillé à 3 heures du matin par les grandes orgues de l'abbaye. L'organiste répétait en pleine nuit, une merveille. Je restais un long moment à la fenêtre à écouter, il faisait doux, l'air sentait les pins. Un moment de bonheur exceptionnel. Le lendemain le concert était consacré au Messie de Haendel. J'avais Giscard et Jacques Barrot devant moi. Giscard n'a pas arrêté de sortir un petit peigne de sa poche qu'il passait dans le peu de cheveux coupés en quatre qui lui restaient sur le crâne. Il m'a passablement énervé et de ce fait m'a en partie gâché mon plaisir...Oui j'ai vu "Une femme à sa fenêtre" et l'ai apprécié, mais ce n'est pas un aussi grand chef d'oeuvre que le "Feu follet" de L. Malle.On l'a d'ailleurs revu à la télé récemment.
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P
Ça me fait rigoler de voir que je me fais exclure des conversations sur mon propre blog, ignorant que je suis... ;-)
A
@Dang,Je prendrai du temps à mon retour pour répondre à votre post qui m'intéresse vraiment , en particulier  pour l'oeuvre critique de M.Bardèche .Là , après une escale chez les Phocéens , je pars demain pour la Haute-Loire ,via le Gerbier -de-Joncs et le Mézenc , pour le plaisir des "hauts-lieux " et après ,descente vers Le Puy ...Oui, les petits gris sont toujours à La Chaise-Dieu ! (j'aime bien aller les voir au moment du Festival ....= un vrai .."bout du monde" ,surtout s'il y a du brouillard  !! ) et les petites soeurs, elles, sont  au Puy .Au fait , puisque vous parlez de L. Malle , avez-vous vu le film que fit   P. Granier- Deferre de " Une femme à sa fenêtre" ,avec R.Schneider, Ph. Noiret  ,etc. ? J'en garde un très beau souvenir ..Je ne sais pas si on le trouve dans le commerce video .A bientôt .Et toujours ,bien sûr , merci à Poly !Ana
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D
@Thaïs : merci pour ce lien très intéressant. Je connais mal E. Berl. Je n'ai lu de lui que "La fin de la IIIe république" et quelques essais parus dans des revues spécialisées. Je garde de mes lectures le souvenir d'un homme très fin, très cultivé, d'une merveilleuse honnêteté intellectuelle. Il serait passionnant de rapprocher ses essais sur l'Europe des nombreuses pages que Drieu a consacrées à ce sujet. Ce qu'il dit aussi des français qui se détestent entre eux aurait pu figurer en exergue de mon billet sur "Et si Sarkozy mettait fin à 200 ans de guerre civile? " publié chez Koz.@Anastasie : Vous citez un livre de Bardèche sur L. Bloy. Je ne savais pas que Bardèche avait écrit ce livre.Vous savez  bien sûr qu'il fut l'un des meilleurs spécialistes français de Stendhal et de Balzac.Lorsque Bardèche publia "Une lecture de Balzac" en 1964 aux "éditions des 7 couleurs" (qu'il avait fondées pour publier ses livres et ceux de Brasillach) il eut droit à une page entière, très élogieuse, dans Le Monde.Quelques années plus tard il fut longuement invité sur le même thème à l'émission "Salle de rédaction" sur France-culture. Je suis à peu près certain que son livre serait boycotté aujourd'hui au nom du politiquement correct. De même que je doute fort que Louis Malle oserait faire un film à partir du "Feu follet" de Drieu de nos jours.Il serait immédiatement catalogué de fasciste, raciste, antisémite.J'en veux pour preuve la mésaventure arrivée il y a quelques années à Robert Courtine, aujourd'hui disparu. Il écrivait une chronique gastronomique très appréciée dans Le Monde, sous le pseudonyme de La Reynière, et ce depuis les années 50 quand Beuve-Méry en personne l'avait engagé. A l'âge de 80 ans passés, alors qu'il était considéré comme l'un des plus talentueux critiques gastronomiques de France et de Navarre il a été remercié parce qu'on s'est aperçu qu'il avait écrit dans sa jeunesse des articles littéraires dans "Je suis partout". C'est tout de même invraisemblable de se priver de tant de talents sous prétexte que ces écrivains ou journalistes ont commis des erreurs de jeunesse. Je n'ai aucune sympathie pour la collaboration, on le sait, mais je me pose la question suivante : est-ce que l'on est pas de plus en plus dans la guerre civile que je dénonçais chez Koz? Est-ce que l'odieux antisémitisme de Rebatet l'a empêché d'écrire sa monumentale  "Histoire de la musique"? Est-ce que le fascisme de Bardèche l'a empêché d'être le spécialiste de Balzac et de Stendhal dont je parlais plus haut? Est-ce que l'engagement de Benoist-Méchin aux côtés des éléments les plus durs de Vichy l'a empêché d'être l'un des plus grands spécialistes européens du monde arabe? C'est d'autant plus absurde que la plupart de ces gens-là avaient payé cher leur engagement politique : 9 ans de taule pour Rebatet par exemple (et plusieurs mois aux fers dans la cellule des condamnés à mort).En tout cas bonnes vacances en Haute-Loire, région où moi aussi j'aime aller me ressourcer (les petits gris sont-ils toujours à La Chaise-Dieu?).
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A
@Polydamas , Je viens de découvrir que M.Bardèche a écrit un Léon Bloy ( La Table ronde, 1989 ) .Quelqu'un a-t-il lu l'ouvrage ?
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